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L'avis du rail

L'avis du rail

Ce blog parle des trains, métros, tramways, enfin de tous les moyens de transports qui utilisent le rail.Ce blog est dédié à mon petit garçon qui est un fou de tout ce qui roule.


Transsibérien de Novosibirsk à Irkoutsk

Publié par A sur 2 Mai 2015, 14:31pm

Catégories : #Voyages en train, #Train

Transsibérien de Novosibirsk à Irkoutsk

L'imposante gare couleur vert pomme semble à la hauteur du monument qu'est le transsibérien. Ce nom qui évoque la Russie des tsars et les étendues sans fin de la taïga a fait rêver plus d'une génération d'aventuriers. Un romantisme au charme désuet reste accroché aux traverses de la célèbre voie ferrée, même si les tenders remplis de charbon de l'Oural, les comtesses oisives et les machinistes aux doigts gelés ont disparu depuis longtemps. Je me souviens avec émotion du legs de mon grand-oncle, ces coupons jaunis matérialisant les fameux emprunts russes qui ont ruiné tant de petits porteurs au début du siècle dernier. Une immense salle d'attente pavée de marbre évoque davantage une salle de bal d'un palais impérial qu'une simple zone de transit. Nous avons de la chance, un train en direction d'Irkoutsk part dans une heure et demie. Pour des raisons pratiques, toutes les horloges indiquent l'heure de Moscou. En effet le transsibérien traverse sept fuseaux horaires sur près de 9000 kilomètres. Je jongle entre plusieurs files d'attente pour atteindre au plus vite un guichet, tout en changeant 25$, soit le prix du ticket, auprès d'un militaire multicarte.

Il est neuf heure du matin lorsque la locomotive électrique du train transsibérien n°102 (le nombre pair indique que nous nous dirigeons vers l'orient) quitte la gare de Novossibirsk pour le lac Baïkal avec une heure de retard. Le train est sensiblement plus confortable que le turksib kazak que nous avions emprunté auparavant. Un compartiment de quatre places avec couchettes escamotables, coffres spacieux pour les bagages, une tablette escamotable en formica et des rideaux oranges en lycra dans la plus pure tradition ferroviaire nous attend. Je me retrouve en compagnie d'un coréen et d'un russe peu loquaces. Nina, la provodnik (contrôleuse) nous remet draps, couvertures, taies d'oreiller et serviettes. La jolie blonde à l'allure sévère relève nos numéros de passeport sans un sourire. Le wagon se compose de dix compartiments. Aux extrémités deux toilettes mais point de douche, ce luxe étant réservé à la première classe. Un samovar en libre service, fournit de l'eau chaude 24 heures sur 24.


Je prends vite le rythme paisible du transsibérien : une alternance de lecture, de contemplation, de discussion avec les autres voyageurs, le tout étant entrecoupé à intervalles réguliers de siestes et de collations. Le samovar permet de boire du thé et de préparer des nouilles chinoises. Il n'y a pas de wagon-restaurant dans ce train omnibus peu fréquenté par les touristes. Au beau milieu d'une sieste, nos compagnons de voyage font hurler une radio dans le couloir. Nous reconnaissons le tube techno-pop du moment, Ya soshla s'uma ("Je deviens folle") des deux lolitas du groupe Tatu. Au passage à Mariinsk et son fuseau horaire, nous réalisons qu'il nous faut déjà avancer nos montres d'une heure.

journée pluvieuse

journée pluvieuse

Les arrêts sont délicats à gérer. Faut il quitter nos affaires des yeux pour descendre ? Le temps de pause varie au grès des avances et des retards du train, et s'éloigner de la voie équivaut à une entreprise périlleuse surtout si un autre convoi vous coupe votre retraite.

Une épaisse pluie arrose la Sibérie occidentale. Je réalise que nous avons été plutôt chanceux dans l'Altaï de ce point vu là. Le paysage défile mollement au travers des vitres embuées du wagon. La forêt de sapins et de bouleaux succède aux riches terres noires des environs de Novossibirsk. De petites isbas bancales aux fenêtres peintes rehaussent le panorama.


La nuit tombe. Nina à qui nous achetons du thé a troqué son sévère uniforme pour une tenue décontractée. La jeune fille d’ordinaire étudiante, travaille comme provodnik l’été. A la différence des lignes importantes, elle est seule à assurer la bonne marche de son wagon, du contrôle des billets au passage de la serpillière des toilettes. Alors que nous éteignons les feux pour une nuit un peu plus confortable que les deux précédentes, survient notre co-locataire coréen, un poisson fumé à la main qu'il compte bien déguster sur le champ. Le voila à déplier un papier journal et un couteau bien plus long que de raison. Il dépieute en silence l'animal qui doit exhaler le même fumet que les étals d'un poissonnier Gaulois d'un lointain village d'Armorique... A minuit, nous franchissons l'Iénisseï à Krasnoïarsk du fait du retard.

Huit heure. Il y a queue au compartiment toilette dont le sol est invariablement inondé par la vigoureuse serpillière de Nina. Les gares s'égrainent telles les perles d'un chapelet : Nizhneudinsk, Zima (qui veut dire hiver), patrie d'un poète local, Touloun . Les pensées vagabondent au grès du roulis du wagon. Comment vit-on ici ? Et l’hiver, est il si terrible ? Aux passages à niveau, des grilles escamotables empêchent les chauffeurs distraits de forcer le passage. 

quai animé

quai animé

Le GPS indique un changement de direction. Nous descendons dorénavant vers le sud est et l’oblast d’Irkoustsk. Angarks dépassé, nous laissons la taïga pour les premières terres cultivées, signe de civilisation : "La traversée d'une forêt, jamais je n'ai imaginé autrement l'arrivée dans un pays de légende". Irkoutsk, nom magique, s’offre à nos yeux ! L'agitation gronde dans les couloirs. Des gens affairés portent des bagages aussi gros qu'eux. Nina, nous reprend drap et taies qu'elle doit revendre en douce. Un sifflet tenace s’échappe de la motrice. 19h40, les freins crissent, les vitres tremblent, la machine stoppe, fière du travail accompli. Tout le monde descend. Les provodniks en grand uniforme stationnent au garde à vous devant leur voiture respective comme pour une revue.

Pékin - Oulan Bator - Moscou

Pékin - Oulan Bator - Moscou

un long serpentin de quelques miliers de kilomètres

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